dimanche 20 avril 2008

LES VIKINGS ET LES CAROLINGIENS


Des règnes éphémères et le début des Robertiens
(877 - 987)

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Des règnes éphémères : 4 rois en 10 ans

  • Louis II-le-Bègue (877 – 879)

Fils de Charles-le-Chauve, il prend la succession à la mort de son père en 877. Il est maladif, chétif et affligé de bégaiement, l’aristocratie profite donc de sa faiblesse pour arracher à la monarchie de nouvelles concessions. Il meurt alors qu’il prépare une expédition contre les comtes de Poitiers et du Mans. Il laisse deux fils d’un 1er mariage, Louis III et Carloman, et sa 2ème épouse est enceinte d’un fils, qui sera Charles-le-Simple : ils deviendront tous les trois rois !

Louis II le Bègue après son couronnement
(Grandes Chroniques de France, BN Paris)

  • Louis III (879 – 882)

Il accepte, ce qui est rarissime dans l’histoire des rois, de partager le pouvoir avec son frère Carloman : il gouverne la Neustrie et l’Austrasie, et laisse à son frère la Bourgogne, l’Aquitaine et la Septimanie (Narbonne, Carcassonne, Béziers et Nîmes).
Après avoir remporté une victoire sur les vikings, il meurt sans descendance en 882 et laisse le royaume à son frère Carloman.

  • Carloman (879 – 884)

Jeune et inexpérimenté, il laisse ses conseillers et le comte de Paris Eudes, fils de Robert-le-Fort, gouverner à sa place. Il meurt à son tour en 884 d’une blessure de chasse, sans aucune descendance. Son demi frère Charles-le-Simple n’ayant que 5 ans, les grands du royaume proposent la couronne à Charles-le-Gros, déjà roi d’Allemagne et d’Italie : il est l'oncle des 2 précédents rois (voir l'arbre généalogique des carolingiens).

  • Charles-le-Gros (884 – 887)

Grâce à la régence accordée par les grands du royaume, il contrôle quasiment le même territoire que son arrière grand-père Charlemagne.
Mais, qui plus est obèse et épileptique, il se montre indigne de ses responsabilités :

  • Il achète à prix d’or la paix avec les vikings au lieu de leur tenir tête,
  • Il dépouille les nobles autrichiens,
  • Il fait exiler sa sœur et crève les yeux d’un neveu rebelle,
  • Il est à la fois rejeté par les nobles français qui désignent en 887 un non carolingien, le comte de Paris Eudes, et par les nobles allemands qui le font enfermer dans une abbaye.

Il y aura donc eu 4 rois en 10 ans ! (voir l'arbre généalogique ... pour mieux se repérer).

Un 1er roi non carolingien : Eudes (888 - 898)

Après les règnes éphémères et peu énergiques de LouisII-le-Bègue puis de ses fils Louis III et Carloman puis de son cousin Charles-le-Gros déposé en 887, il fallait un homme fort capable de juguler l'anarchie ambiante : Eudes, comte de Paris, d'Anjou et de Touraine sera ainsi élu roi en 888, remettant en cause le principe d'hérédité du trône. Il est donc désigné roi de France au détriment de Charles-le-Simple, dernier héritier carolingien.

Il est fils de l’illustre Robert-le-Fort, qui a défendu le royaume contre les vikings en 853 : ce dernier est à l'origine de la lignée des Robertiens, et il est l'arrière grand-père d'Hugues Capet qui donnera son nom à la dynastie des Capétiens.

Eudes s’est déjà illustré à deux reprises contre les vikings :

  • une 1ère fois en 879,
  • puis en 885 contre 700 drakkars et 20000 vikings : le siège durera un an avant le retrait des assiégeants. Charles le Gros leur verse un tribu pour qu’ils quittent la ville.

Le comte Eudes défend Paris contre les Normands
(d'après Schnetz du XIXe, exposé au château de Versailles)


Photo : merci Olivier P !
Cette plaque commémorative est localisée sur le parvis de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris, à l'entrée de la crypte : elle illustre les durs combats menés par le Comte Eudes et ses compatriotes contre les vikings.

Eudes meurt en 898 et Charles-le-Simple devient roi : la couronne revient aux carolingiens, comme il avait été acté car certains seigneurs contestaient que le dernier descendant posthume de LouisII-le-Bègue ait été écarté de la succession : mais la famille des robertiens continuera à tisser sa toile !

Charles-le-Simple (898 – 923)

Il devient enfin roi de France après que le trône lui ait été refusé à deux reprises :

  • une première fois à l’avantage de son oncle Charles-le-Gros en 884,
  • puis en 888 avec Eudes,

Son qualificatif signifie « loyal » et non pas « sot », mais il ne fait pas preuve d'une capacité politique remarquable… Il est impuissant face aux seigneuries féodales qui se renforcent à l’abris de leurs châteaux-forts et il leur accorde des concessions qui les renforcent davantage.

Le traité de Saint-Clair-sur-Epte avec les Vikings

Il se montre par contre diplomatique pour résoudre le problème viking avec le traité de Saint-Clair-sur-Epte en 911 (ces négociations ont été entamées avec Eudes) :

En effet, les normands, commandés par Rollon sont très profondément ancrés sur la Somme, la Seine et la Loire. Charles III-le-Simple et les évêques ont la bonne idée de proposer à Rollon l’installation des hommes du nord dans les 3 diocèses de Rouen, Evreux et Lisieux. Le duché de Normandie vient de naître, et deviendra grâce au zèle de ses dirigeants l’un des plus puissants de France.

Au titre de cet accord, leur chef Rollon se fait baptiser, épouse la fille de Charles-III-le Simple et adopte des principes à la fois francs et scandinaves.

Une anecdote : Rollon, dédaigneux envers Charles-le-Simple, fait rendre l’hommage par l’un des siens : devant baiser son pied, ce dernier le prend pour le porter à la bouche plutôt que de s’agenouiller, jetant ainsi le roi à la renverse, ridiculisant encore Charles-le-Simple devant les nobles présents !

La prise de contrôle par les robertiens

En 922, les aristocrates menés par le frère d'Eudes, Robert Ier, se coalisent, désignent comme nouveau roi Robert Ier et renversent Charles-III-le Simple : le roi déchu contre-attaque et durant la bataille qui oppose en 923 à Soissons les deux armées, il fait preuve d’une grande bravoure.

Robert Ier est tué mais son fils Hugues-le-Grand parvient à ranimer le courage de ses soldats et à mettre en déroute l’armée de Charles-le-Simple.

Le roi se réfugie chez un de ses vassaux et sa seconde épouse s’enfuit en Angleterre avec leur jeune fils, qui sera le futur roi Louis IV d’Outre-Mer.


Robert 1er est tué par le porte étendard de Charles-le-Simple à Soissons

C'est Raoul, duc de Bourgogne et gendre de Robert Ier, qui est élu roi en 923.
Il se défendra entre autres face aux incursions hongroises (926) et normande (930), et aura la dure tâche de s’imposer face aux vassaux qui se permettent de battre leur propre monnaie. Il meurt en 936 sans descendant et son frère Hugues-le-Grand installe sur le trône le fils de Charles III-le-Simple qui avait été exilé en Angleterre, Louis IV d'Outre-Mer (voir l'arbre généalogique ... car ça se complique ...).

A la mort du roi Louis IV d'Outre-Mer en 954 , Hugues-le-Grand laisse monter sur le trône le fils du roi, Lothaire, âgé de seulement 13 ans. Le roi reste sous la tutelle de Hughes-le-Grand qui en profite pour s’octroyer les duchés d’Aquitaine puis de Bourgogne.
Il meurt en 986, probablement empoisonné par sa femme : son fils Louis V lui succède.

Hugues-le-Grand

C’est un homme de pouvoir et un fin manipulateur : plutôt que de revendiquer la couronne, il préfère la faire porter à une personne qui lui est dévouée. Il devient également l’oncle de Louis IV en épousant la sœur de sa mère.

Louis V meurt à son tour seulement 15 mois après être monté sur le trône d’une chute de cheval lors d’une partie de chasse. Il n’a pas d’héritier et le dernier carolingien, son oncle Charles, duc de Basse-Lorraine, est détesté de tous les nobles, qui lui préfèrent Hugues Capet, fils de Hughes-le-Grand. Hugues Capet se fait ainsi élire roi en 987, mettant fin à la dynastie des carolingiens et inaugurant pour 8 siècles celle des capétiens.

Comme les Pippinides avaient progressivement pris le pouvoir aux mérovingiens, les robertiens auront fait de même aux carolingiens.


Le développement de l'ordre de Cluny

Au début du règne des carolingiens, les monastères ne respectent plus la règle de Saint Benoit : pour obliger les monastères à respecter ses principes fondamentaux, Louis le Pieux imposera par le capitulaire de 817 la règle bénédictine à tous les monastères ... mais sans grand succès.

Dans le contexte de délabrement global de la vie monastique, le duc d'Aquitaine et comte de Mâcon Guillaume cédera en 909 à l'abbé Bernon un domaine dans la Saône pour qu'il y fonde le monastère de Cluny sous le patronage des apôtres Pierre et Paul, et qui sera libéré de toute tutelle laïque.

L'ordre de Cluny connaîtra un essor extraordinaire : au XIIe, environ 300 établissements avec près de 10000 moines y seront affiliés en Europe, une densité jamais atteinte pour un ordre monastique !


Eglise de Cluny III
BNF, Cabinet des Estampes

La suite ...

LES VIKINGS ET LA FRANCE DU MOYEN-AGE.


Les Vikings et la France féodale de Charles-le-Chauve
(843 - 877)

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Un règne difficile pour Charles-le-Chauve

Suite à la mort de son père Louis-le-Pieux en 840 et au traité de Verdun en 843, Charles-le-Chauve hérite d'un territoire similaire à la France actuelle privée de la Provence, de la Franche-Comté et de l'Alsace-Lorraine. Charles-le-Chauve devient ainsi le roi de la Francia Occidentalis en 843.

Il ne doit pas son surnom à une calvitie, mais au fait qu'il se soit fait raser le crâne lors d'une cérémonie religieuse en signe de soumission à l'église, à l'encontre de la tradition franque exigeant que le roi ait les cheveux longs.

Intelligent et habile en politique, il aura un règne difficile à cause des incursions vikings qu'il ne parviendra pas à contenir : il sera ainsi contraint en 845, 852, 856 et 861 de payer les normands pour qu'ils s'en aillent (ce qui ne les empêche aucunement de revenir par la suite ...). Le roi perd suite à ces affronts toute légitimité.

Le péril viking

Des guerriers et pirates redoutables : depuis leur base scandinave, les vikings ("hommes du nord") multiplient les raids le long des côtes d'Europe depuis la fin du VIIIe avec leurs fameux drakkars. Les vikings sont motivés pour partir en quêtes de meilleurs territoires et de richesses car le leur est hostile, froid, couvert de landes, de bois et de montagnes et ces terres sont difficiles à cultiver.

La puissance de l'empire carolingien les avait initialement incité à éviter le royaume et à concentrer leurs incursions et pillages en Angleterre à partir de 780 puis en Ecosse et Irlande. Au début du IXe, ils mènent également des incursions en Allemagne et aux Pays Bas.

La faiblesse de la Francia Occidentalis de Charles-le-Chauve les incitent à mener dès le IXe leurs raids sur les côtes de la Mer du Nord, de la Manche et de l'Atlantique du royaume carolingien :

  • en 843, une centaine de drakkars attaquent et pillent Nantes : l'évêque de Nantes sera tué dans sa cathédrale avec de nombreux fidèles,
  • en 845 : plus d’une centaine de drakkars remontent la Seine et pillent Paris en brûlant les monastères et les églises. L’armée royale de Charles-le-Chauve, désemparée, s’enfuie. Les vikings quittent la ville contre un tribu de 7000 livres d’argent,
  • en 852 : une centaine de drakkars s’installe en bord de Seine à Jeufosse, à mis chemin entre Rouen et Paris : ils pillent la vallée et incendient à Tours le Sanctuaire de Saint Martin, le plus populaire de Gaule. Charles-le-Chauve, aidé pourtant de son frère Lothaire, n’ose pas intervenir,
  • en 856 : Paris est à nouveau attaquée : ils menacent de tout brûler si on ne leur verse pas une forte somme d’argent : Charles le Chauve s’exécute,
  • ils récidivent en 858 et en 861.
En savoir plus sur les explorations vikings en Islande, au Groenland ... et en Amérique 500 ans avant Christophe Colomb !

Les drakkars : (=landskip en langue normande)

Ces fameux bateaux, qui accueillaient environs 30 rameurs et pouvaient transporter de 50 à 70 guerrier, avaient les caractéristiques suivantes :

  • dimension effilée : 18m de long en moyenne (difficilement extensible car la quille était constituée d’une seule poutre en chêne) pour 2,5m de large,
  • structure assez plate pour remonter les cours des fleuves à la rame : le tirant d'eau n'était que de 50cm,
  • les flancs étaient constitués de planches qui se chevauchent successivement (comme les tuiles d’un toit) et des boucliers ronds protégeaient les flancs,

Détail de la tapisserie de Bayeux
  • la voile était carrée,
  • le pont ne comportait ni cabine ni banc : les rameurs s’assoient sur des malles contenant leurs armes et leurs rations alimentaires,
  • la proue était souvent ornée d’un dragon sculpté (drakkar en normand).

Les drakkars pouvaient filer à 5 noeuds à la rame et sous conditions favorables, ils pouvaient faire des pointes à 9 noeuds (Orange II a depuis fait le tour du monde à 40 noeuds en moyenne !).

Représentation 3D du site image-in-air3d par pjero

L'aristocratie étend son pouvoir : naissance de la féodalité

Les grands du royaume profitent des troubles provoqués par les normands pour reprendre leur indépendance ou bénéficier de nouvelles terres :

  • Pour avoir vaillamment participé à la défense de Tours contre les normands en 853, le roi concède l'Anjou en 864 à Robert-le-Fort. Il sera l'ancêtre des robertiens, qui donnera naissance à la future dynastie des capétiens (voir leur arbre généalogique).
  • Le comte de Flandre reprend son indépendance vers 880, suivi du Duc de Bourgogne.

Impuissant face à cette insubordination, Charles-le-Chauve publie à l'occasion d'une assemblée générale à Quiercy-sur-Oise en 877 un capitulaire reconnaissant le principe d'hérédité des charges et des bénéfices : c'est une immense victoire de l'aristocratie car auparavant, le roi distribuait ses comtés à ses bons vassaux et les reprenait aux moins méritants.

Le roi Charles-le-Chauve meurt en 877 après avoir tenté, suite à une demande du Pape, d'arrêter les sarrasins en Italie du Sud.

Sa mort va encore affaiblir le pouvoir royal des carolingiens : son seul fils survivant Louis II-le-Bègue lui succède : mais aucun successeur ne pourra se passer de l'appui des grands seigneurs que Charlemagne était parvenu à contrôler et ces derniers en profitent pour :

  • étendre leur pouvoir : fabrication de monnaie, levée des impôts, justice, ...
  • assurer la défense que la royauté est incapable d'assurer, en constituant des armées et en construisant des châteaux-fort.

La fin du IXe est donc marquée par la constitution de grandes principautés : le pouvoir du roi est amoindrit et cela contribuera à l'initialisation de la féodalité.

LES RUNES, THOR et ODIN


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